Google Drive et l’intégration des TIC à l’école en général

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Google Drive et l’intégration des TIC à l’école en général

J’ai eu l’opportunité d’assister à l’atelier Google Drive 101. Avec plus d’une cinquantaine de participants et sans compter sur ceux qui étaient connectés en webdiffusion, il y a lieu de croire que Google Drive attire l’attention de plusieurs enseignants.

 

Qu’est-ce que Google Drive

Google Drive est un espace disque dans le cloud disponible pour tous les utilisateurs Google. En gros, c’est un service d’hébergement de données sur Internet. Quiconque s’y inscrit peut donc déposer jusqu’à 15 Go de fichiers de toutes sortes – musiques, images, documents et plus encore – sur les serveurs de Google. On peut alors avoir accès à ces données à partir de n’importe quel appareil pour autant qu’il soit connecté sur le web.

 

Le développement de Drive est intimement lié à celui de la suite bureautique de Google, qui comprend les services Docs, Slides, Sheets, Drawings et Forms. En gros, c’est un équivalent en ligne et gratuit à la suite Office de Microsoft, qui comprend, entre autres, les fameux Word, Power Point et Excel. Avec les services de Google, un utilisateur peut travailler sur tous ses documents peu importe où il se situe dans le monde. On peut y travailler à plusieurs de façon dynamique; si des utilisateurs ont les droits, ils peuvent modifier le travail en même temps que leurs coéquipiers.

 

Ce qu’on y a fait

Au-delà d’une formation sur la suite bureautique de Google, l’activité Google Drive 101 a su rassembler des idées intéressantes pour exploiter ces logiciels dans un cadre didactique. Bien sûr, les techniques fondamentales pour maîtriser les bases de Drive, et plus spécifiquement de Docs, ont été explorées. On y a donc présenté les fonctionnalités les plus courantes, les plus utiles et les plus originales. Il est clair que pour quiconque n’ayant jamais travaillé dans le cloud, c’est une méthode de travail radicalement différente qui prend du temps à maitriser.

 

Mais le coeur de cette activité se situe dans les portes ouvertes par les conférenciers à l’intégration de Drive au quotidien de la classe. Il faut dire que les présentateurs étaient de fins connaisseurs de cette intégration: Benoit Petit, conseiller pédagogique au RÉCIT national éthique et culture religieuse et spécialiste de la mobilisation des TIC en éducation; Brigitte Besnard, conseillère pédagogique à l’APO de la Direction du service des technologies de l’information de la CSSMI; Thierry Nadeau, enseignant au primaire plus qu’impliqué et à la classe exceptionnellement branchée. Une fois bien présenté, il ne restait plus qu’à proposer un buffet d’activités réalisées dans des classes à l’aide de Drive. On a proposé d’utiliser Forms pour faire des dictées qui se corrigent automatiquement une fois complétées. On a aussi suggéré de faire des liens entre les documents pour réaliser une sorte d’application pour mobile. On a transformé Drawings en logiciel de TBI , où les jeunes pouvaient écrire en en temps réel. Sheets et Forms ont été travaillés pour devenir une jauge dynamique qui compile les résultats d’un sondage réalisé par les élèves au fur et à mesure qu’ils y répondent. La clé de la présentation; les TIC en classe prennent vie par la créativité des enseignants qui les utilisent.

 

La réflexion

Drive est un outil merveilleux pour éducation qui peine cependant à être exploité dans nos écoles. Et on ne parle pas d’un logiciel très spécialisé dont l’utilité réelle est proportionnelle à la volonté et la créativité de l’enseignant qui les utilise. C’est un outil polyvalent qui s’intègre à toutes les matières, qui s’adapte à tous les utilisateurs et qui remplace un grand nombre d’outils matériels, comme le crayon, le tableau, les pinceaux, les calculatrices, etc. Drive synthétise également plusieurs autres TIC dans une seule et même suite. Plusieurs enseignants pourraient aisément se passer d’Office, d’une foule de logiciels pour TBI, de toutes sortes de plateformes coopératives et de bien d’autres logiciels avec un peu d’imagination. Pourtant, plusieurs s’y refusent encore.

 

Les services Google deviennent de plus en plus populaires dans les entreprises et les organisations. Leur maitrise à l’extérieur de l’école est souvent pratique pour les élèves. Tout porte à croire que Drive – ou tout autre service du genre – ne sera pas qu’une mode passagère et que les alternatives cloud deviendront choses communes. Google réclamait 190 millions d’utilisateurs fréquents à la mi-2014. On ne compte ici pas les utilisateurs de produits similaires, tels iCloud d’Apple, OneDrive de MIcrosoft ou Dropbox de la firme du même nom. Ne serait-ce que pour développer un réflexe technologique, il semble que nous soyons obligés, en tant qu’enseignants, de considérer l’utilisation de ces logiciels.

 

La question est donc de connaitre la raison pour laquelle nos écoles intègrent si lentement ces technologies alors qu’elles apparaissent comme l’avenir. De plus, l’éducation, nous le savons tous, est justement l’affaire de l’avenir. Alors qu’on pourrait s’intéresser aux raisons financières ou techniques de cette question, j’ai aujourd’hui cherché à savoir si les enseignants eux-mêmes y sont pour quelque chose dans l’équation. Quoi de mieux que d’interviewer Benoit Petit à ce sujet, lui-même ayant catalysé le processus d’intégration des TIC dans bien des écoles. En espérant que le lecteur, lui-même intéressé au TIC, soit plus en mesure de contribuer à cet inévitable changement dans son propre milieu.

 

Première piste: la culture

Il y a certainement une composante culturelle à ce problème pour Benoit Petit. Après tout, notre culture n’est pas encore adaptée à des changements aussi drastiques que ceux qui se produisent actuellement; enseignant ou pas, les technologies en dépassent plusieurs, même les experts en la matière. Dans les écoles, intégrer les TIC peut vouloir dire remettre en question sa pratique, ce qui, nous le savons, est parfois exigeant.

 

Mais il semble que ce ne soit pas la raison principale. Les entreprises ont compris depuis longtemps le besoin de changer et ont rapidement exigé un ajustement de la part de leurs employés. Ce serait donc possible de le faire aussi dans les écoles. Benoit Petit a cependant remarqué que certains enseignants ont parfois un sentiment d’incompétence en informatique. Il ne suffit pas de vouloir changer pour changer; il faut développer des compétences, et ce n’est pas toujours facile. Même si on réussit à repousser la résistance culturelle, apprendre les bases des TIC n’est pas une mince affaire.

 

Deuxième piste: l’âge

Est-ce un mythe que de dire que la situation va se résorber avec le temps? On a souvent entendu dire que l’arrivée de jeunes diplômés en éducation, qui ont pour la plupart toujours connu l’informatique, sera une force de changement à même les écoles

 

Il y a certainement un mouvement très jeune qui tend à utiliser naturellement les TIC. Mais ça a ses limites; “L’outil [les TIC] reste un jouet pour plusieurs. Il reste attaché au plaisir.” selon Benoit Petit. “Certaines habitudes technologiques sont moins limitantes; il est par exemple facile pour les jeunes de se créer un compte sur un service web.” Mais ces compétences restent souvent dans le domaine du divertissement et ne sont pas toujours transposées au travail.

 

Être jeune ne veut pas non plus dire qu’on connaisse le vocabulaire informatique: “On utilise un frigidaire à tous les jours, mais on ne sais pas nécessairement comment il fonctionne” image-t-il. C’est certainement une faiblesse pour le développement des TIC en éducation, car les enseignants ne connaissent pas nécessairement tous les outils qui sont à leur disposition. Ils ne savent pas non plus toujours comment intégrer ceux qu’ils connaissent pourtant déjà.

 

De l’autre côté, il y a les enseignants plus expérimentés. Même s’ils n’ont pas toujours enseigné à l’aide des TIC, Benoit Petit remarque que plusieurs s’en tirent très bien. Souvent, c’est le besoin de nouveaux défis qui les motive à s’intéresser aux TIC. À cela s’ajoute le fait que l’expérience apporte la maitrise de l’enseignement. En classe, cela peut vouloir dire qu’on peut, par exemple, plus facilement se concentrer à développer ses compétences avec les TIC plutôt que mettre des énergies dans la gestion de classe.

 

Troisième piste: ce débat devenu émotif

Changer nos méthodes d’enseignement, ce n’est pas si facile. Et d’un autre côté, quand on y est motivé, il peut être décourageant de voir que nos écoles n’évoluent pas en ce sens.

 

“Le débat est devenu émotif”, selon Benoit Petit. Il y a clairement un inconfort chez plusieurs enseignants à changer leurs méthodes pour les adapter aux technologies contemporaines. Cet inconfort est refoulé et caché sous une série d’arguments dits rationnels. Car, on le sait, les émotions tendent à ne pas être amenées sur la place publique. Il y aurait donc à l’origine d’un débat à l’allure réfléchie des émotions rattachées à la résistance au changement.

 

De la même façon, les enseignants motivés à développer les TIC vont développer leurs propres arguments rationnels pour répondre aux critiques. Toutefois, il n’en reste pas moins que ces arguments sont également émotifs, car plusieurs défenseurs des TIC ont une sorte de frustration à voir le changement se produire aussi lentement. Une fois de plus, la réponse est émotive.

 

Compte tenu des changements faits par la société, il semble qu’il ne soit plus possible de refuser totalement les TIC. Le conseil de Benoit Petit: “Une des stratégies est de gérer les émotions: on outille en fonction de l’expérience vécue par les enseignants.” Au final, il faut accepter ces émotions dans le débat et transformer la transition en un processus collaboratif plutôt qu’un processus confrontant. On prend les expériences des uns, les expériences des autres, on cherche à essayer ce qui fonctionne à quelque part, à trouver des solutions pour gérer le changement, à comprendre comment les enseignants vivent le changement pour mieux s’y adapter. Benoit Petit reconnait ici un rôle particulier au leadership de l’expert en TIC de l’école: il doit trouver ce qui fonctionne bien chez lui, accepter que changer peut être difficile pour certains, s’adapter, vivre différemment le succès. Les enseignants doivent, quant à eux, prendre conscience des émotions qui motivent leurs arguments pour revenir à un débat rationnel et constructif.

 

Ce qu’on retire de l’activité

Il nous a été démontré que Google Drive peut rapidement devenir central dans un enseignement à l’aide des TIC. Des outils qui paraissent pourtant simples et qui, à première vue, ne se veulent que des alternatives au matériel déjà existant se sont avérés d’une puissance non négligeable. Les quelques caractéristiques supplémentaires de Drive ont permis à la créativité d’enseignants et de conseillers pédagogiques de proposer de nouvelles activités qui rendent le travail déjà fait par les enseignants plus contemporain.


Si ces outils paraissent nécessaires à bien des enseignants, il faudra cependant qu’ils sachent comment les apporter dans leur milieu. L’ouverture de tous et chacun ne peut être que bénéfique à mener à terme le processus qui est enclenché dans nos sociétés, mais qui tarde dans bien des écoles. C’est vrai surtout si l’on désire faire de la transition technologique un changement durable et profitable.

Équipe de Chroniqueurs Web
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L'équipe de Chroniqueurs Web est composée d'étudiants et de retraités en enseignement qui livrent leurs impressions sur leur participation au colloque de l'AQUOPS.

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